Comment expliquer les prix négatifs sur le marché de l’électricité ?
Augmentation du nombre d’heures de prix négatifs sur le marché énergétique
En Belgique, en 2023, pas moins de 252 heures de prix négatifs ont été enregistrées, contre 117 heures en 2022. Et la tendance s’accroit encore en 2024, avec déjà 231 heures de prix négatifs au 26 juin.
Cette évolution considérable nous rapproche donc du nombre total d’heures négatives enregistrées en 2023, et ce, à mi-année comme on peut le voir ci-dessous.
Nombre d’heures négatives en hausse année après année en Europe
Source : ENGIE Energy Scan
Zoom sur le nombre d’heures négatives en hausse année après année en Belgique
Source : ENGIE Energy Scan
Elia s’attend d’ailleurs bien à ce que ces épisodes de prix négatifs se répètent, notamment cet été*. En juillet par exemple, nous pourrions observer des excédents de production d’électricité puisque la production photovoltaïque devrait être considérable.
Un vrai challenge pour le marché de l’électricité qui doit rester en équilibre, alors que la demande estivale reste limitée. En effet, l’une des principales caractéristiques de l’électricité est qu’elle ne peut pas actuellement être facilement stockée. La production d’électricité est donc censée s’adapter constamment à la consommation pour assurer la stabilité du réseau (retrouvez plus d’informations sur les mécanismes du marché dans cet ebook).
Cette situation pourrait donc avoir un impact important sur les prix comme nous allons le comprendre ci-dessous.
Comment les prix de l'électricité peuvent-ils être négatifs ?
Les prix de l’électricité sont fortement volatils et fluctuent selon différents facteurs tels que les prix du gaz et des droits d’émission de CO2, le volume d’énergie demandé aux différents moments de la journée ou de l’année mais aussi la technologie utilisée pour produire l’électricité.
Une heure à prix négatif résulte de l’inadéquation entre l’offre et la demande qui s’explique dans ce cas par :
- une production importante et peu flexible d’électricité.
- un faible niveau de demande (comme par exemple les jours fériés, le week-end ou les périodes de vacances).
En effet, les éoliennes et les installations photovoltaïques produisent beaucoup d’électricité lorsque les conditions météorologiques sont propices.
Combinée à la production d’électricité des centrales qui assure la fourniture d’électricité pour la consommation de base de jour comme de nuit cela peut rapidement représenter un surplus de production d’électricité.
La complexité de la gestion de ce surplus de production réside notamment dans la limite de flexibilité des actifs de production. Par exemple, la mise en arrêt des centrales peut engendrer des contraintes techniques et économiques considérables.
Si ce surplus de production se produit pendant des périodes de faible consommation (par exemple, la nuit, le weekend, les jours fériés ou l’été), l’offre dépasse alors considérablement la demande et les prix peuvent alors devenir négatifs.
Quel est l'impact réel pour les entreprises disposant d'une installation photovoltaïque ?
Pour mieux comprendre l’impact de ces prix négatifs, prenons l’exemple d’une entreprise qui a installé des panneaux solaires.
Lors des weekends ou jours fériés très ensoleillés, la production photovoltaïque est très élevée et dépasse les besoins de consommation de l’entreprise. L’entreprise injecte donc son surplus d’électricité sur le réseau.
Cette offre excédentaire ne pouvant pas être stockée, elle peut être en quelque sorte considérée comme un “déchet”, créant un déséquilibre sur le réseau et résultant dès lors en un coût pour l'entreprise.
Les prix d’injection deviennent alors négatifs. En d’autres termes, l’entreprise doit ‘payer’ pour injecter l’électricité qu’elle a produite sur le réseau électrique dont l’équilibre est menacé.
Volume d’électricité injecté vs. prix d’injection (exemple du 13/04/24)
Un phénomène surprenant qui heureusement ne représente qu’un impact limité par rapport aux économies totales réalisées annuellement grâce à la production photovoltaïque.
En quête de flexibilité : des solutions en cours de développement
Pour compenser la combinaison d’une surproduction d’électricité et d’une faible consommation, la Belgique pourrait exporter son surplus d’électricité vers ses pays voisins. Cependant, cette exportation n’est pas garantie, car il est fort probable que nos voisins se trouvent dans une situation similaire à la nôtre.
Cette situation représente alors un vrai challenge pour le système énergétique et des efforts en termes de flexibilité sont nécessaires autant au niveau de l’offre que de la demande.
Les acteurs du marché de l’énergie étudient différentes solutions pour mieux pallier ces déséquilibres du marché notamment en améliorant les prévisions de demande et d’offre selon les modèles météorologiques et en mettant en place plus de possibilités de stockage (plus de détails concernant ces solutions seront communiqués ultérieurement).
Les consommateurs sont aussi appelés à plus de flexibilité en adaptant leur consommation ou leurs heures d’activités selon la prévision des volumes importants de production.