Quelles sont les perspectives pour les prix de l’énergie à l’horizon 2030 ?

Deux fois par an, nos experts analysent l’évolution des prix de l’énergie pour les 5 prochaines années. Cette édition de juillet 2025 reste relativement en ligne avec l’édition précédente. Voici un résumé des principaux points.
Niels
Niels Villers
31/07/2025 |
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Le contexte macro-économique

Depuis l’arrivée de Donald Trump à la présidence, le dollar a perdu de sa force face à l’euro. Ce phénomène s’est produit malgré une stabilité relative des taux d’intérêt entre les deux zones. Cela traduit une érosion de la confiance des investisseurs étrangers, ébranlée par les nombreux revirements et annonces imprévisibles de l’administration américaine. Même la récente accalmie des tensions commerciales avec la Chine n’a pas suffi à redonner un élan au billet vert.

À moyen-terme, l’affaiblissement du dollar semblait inéluctable. 
Les États-Unis restent en effet confrontés à deux déficits majeurs :

  • un déficit public qui va s’amplifier après l’adoption du One Big Beautiful Bill ;
  • un déficit commercial alimenté par une forte demande intérieure, largement comblée par des importations, ce que ne pourra résoudre la hausse des tarifs douaniers.

Son repli est beaucoup plus rapide et marqué qu’attendu, mais cela reflète aussi probablement la volonté de l’administration US qui n’obtiendra peut-être pas les concessions attendues sur le plan de la guerre commerciale, mais est ravie de la chute du billet vert qui dope la compétitivité des produits US. Il devient dorénavant possible que le taux de change EUR/USD retrouve les sommets atteints en 2018 et 2021, vers 1.25.

Du côté européen, l’Allemagne, moteur économique de la zone euro, a annoncé un assouplissement de sa politique budgétaire après s’être libérée de certaines règles strictes. Cette évolution pourrait réduire l’excédent extérieur de la balance commerciale européenne et freiner, dans une certaine mesure, l’appréciation de l’euro.

Graphique linéaire montrant l'évolution du ratio de change euro-dollar de 2015 à 2030

Quelle sera la tendance des prix du pétrole ?

Dans notre dernière édition, nous avions correctement anticipé une chute rapide des prix du pétrole jusqu’à 60 USD le baril, alors qu’ils s’échangeaient encore autour de 75 USD. Cette baisse s’explique principalement par une situation de surproduction qui touche le marché depuis début 2025 et devrait durer jusqu’à fin 2026.

Ce déséquilibre est lié à un ralentissement de la demande mondiale, notamment en Chine et aux États-Unis. Toutefois, la guerre commerciale pourrait s’avérer moins intense et moins néfaste qu’anticipé.

L’OPEP+ (OPEP + Russie et quelques autres producteurs) a également radicalement tourné le dos à sa politique de restriction de l’offre pour soutenir les prix et s’est au contraire engagé dans une reconquête de ses parts de marchés en accélérant la remontée de sa production.   

Même si une nouvelle baisse des prix reste possible, nous privilégions un scénario de stabilisation dans le bas de la fourchette, entre 60 et 70 dollars le baril. Trois raisons principales soutiennent cette hypothèse :

  • L’OPEP+ pourrait poursuivre sa politique de reconquête de ses parts de marché.
  • Après la guerre entre Israël et l’Iran et l’intervention américaine pour détruire le programme nucléaire iranien, l’Iran apparaît trop affaibli pour faire peser un risque géopolitique lourd sur la région, du moins à court-moyen terme. Un possible accord sur le nucléaire iranien pourrait permettre à l’Iran de maintenir ses exportations de brut autour de 1,5 million de barils par jour.
  • Une reprise progressive de la demande mondiale pourrait soutenir les prix, même si la tendance de fond reste à la baisse avec la transition énergétique.
Graphique linéaire montrant l'évolution du prix du pétrole Brent de 2015 à 2030. Inclut les courbes à terme et les prévisions d'avril 2024 et d'octobre 2024. Les prix atteignent leur maximum vers 2022, puis chutent et se stabilisent.

Évolution attendue des prix du gaz naturel

Le marché du gaz naturel reste tendu après un hiver froid et une forte demande en gaz liquéfié (GNL). Les États-Unis ont puisé massivement dans leurs réserves, rendant difficile la reconstitution des stocks pour l’été. 

On attend une hausse de la demande en fin d’année. En hiver, la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables baisse généralement. Par ailleurs, la croissance des centres de données liés à l’intelligence artificielle devrait augmenter la consommation électrique, donc la demande en gaz.

De nouvelles capacités d’exportation de gaz naturel sont attendues d’ici fin 2025, notamment aux États-Unis, au Qatar et au Canada.

À moyen terme (2026-2030), l’offre mondiale pourrait dépasser la demande, ce qui ferait baisser les prix. Cependant, ce scénario dépendra des conditions météo, des décisions politiques et de l’évolution de la demande en Asie.

Graphique linéaire des prix TTF en EUR/MWh de 2015 à 2030, avec un pic autour de 2022-2023. Le graphique compare les courbes à terme et les prévisions d'avril et d'octobre 2024.

Comment évolueront les prix de l'électricité ?

La France devrait rester le marché le moins cher grâce à une importante capacité nucléaire, malgré la nécessité d’absorber un excès d’électricité solaire en été. Les prix à court terme profitent de la bonne disponibilité actuelle de son parc nucléaire.

L’Allemagne fait face à une une réduction de ses capacités de production thermique, ce qui pourrait poser problème si la demande augmente fortement. La baisse des tarifs de distribution pourrait en outre encourager une consommation plus élevée.

En Belgique, les prix devraient dépasser ceux de l’Allemagne, en raison de la fermeture définitive de 5 des 7 centrales nucléaires et d’une dépendance accrue au gaz.

Globalement, les prix de l’électricité en Europe devraient rester tendus jusqu’à la fin 2026, surtout en hiver, en raison des coûts élevés du gaz, des droits d’émission de CO2 et de la fermeture récente de centrales au charbon qui limite l’offre thermique.

Entre 2027 et 2028, une baisse plus marquée des prix est attendue avec la diminution des prix du gaz et l’arrivée de nouvelles capacités éoliennes. L’influence de la production solaire sur les prix de l'électricité devrait en outre atteindre son maximum grâce aux mesures prises par les acteurs du marché pour limiter les prix fortement négatifs (flexibilité, stockage etc.).

À partir de 2029, plusieurs facteurs pourraient faire remonter les prix : une demande de base plus forte, la hausse des prix du carbone, et un manque de capacités pilotables pour compenser les périodes avec peu de renouvelables. Le développement important du stockage à court terme aidera à limiter les périodes de prix extrêmement bas, soutenant ainsi les prix globaux.

En conclusion: le prix du gaz reste un élément d’influence clé pour les prix de l’électricité, et le marché devra faire face à de nouveaux risques liés à un équilibre serré du gaz l’hiver prochain et à la hausse continue des coûts du carbone.

Graphique linéaire intitulé « BE Base EUR/MWh » montrant les prix de l'énergie de 2015 à 2030. Il y a un pic en 2022 avec des prix supérieurs à 200 EUR/MWh. Deux lignes montrent les prévisions pour le 30 avril 2024 et le 30 octobre 2024, les prix se stabilisant autour de 50 EUR/MWh après 2024.Graphique linéaire montrant les prix EUA (EUR/tonne) de 2015 à 2029. Les courbes à deux termes et les prévisions montrent une tendance générale à la hausse, avec un pic vers 2025.

Et les droits d’émissions de CO2 (EUA) ?

L’augmentation rapide de la production d’énergie renouvelable, associée à une reprise industrielle plus lente que prévu en Europe, a fortement limité la demande de quotas d’émission de CO2. Cela a entraîné une baisse des prix, que nous avions déjà anticipée dans nos prévisions d’avril dernier. Cette offre excédentaire devrait continuer à peser sur les prix.

À partir de 2026, nous attendons un resserrement du marché, qui soutiendra une hausse plus nette des prix du CO2. Cette évolution sera renforcée par la réduction progressive des quotas disponibles et par une reprise industrielle progressive, encouragée notamment par la baisse des taux d’intérêt.

Enfin, les secteurs du transport maritime et aérien contribueront également à augmenter les émissions, poussant les prix à la hausse.

Graphique linéaire montrant les prix de l'EUA (EUR/tonne) de 2015 à 2030. Les courbes à deux termes et les prévisions montrent une tendance générale à la hausse, avec un pic vers 2025.

Conclusion

L’avenir des prix de l’énergie est marqué par une combinaison complexe de facteurs économiques, géopolitiques et environnementaux.

À court terme, on observe une pression à la baisse sur le pétrole et les droits d’émission de CO2, tandis que le marché du gaz reste sous tension, avec un risque de volatilité important cet hiver.

À partir de 2027, la croissance des énergies renouvelables et les avancées technologiques en matière de stockage et de gestion de la demande devraient stabiliser les marchés électriques et réduire la volatilité des prix. Parallèlement, la concurrence mondiale pour le gaz naturel liquéfié (GNL) et l’évolution des quotas carbone continueront d’influencer fortement les coûts énergétiques en Europe.

Pour les entreprises et les décideurs, il est essentiel d’adopter une stratégie proactive, d’investir dans la flexibilité et les solutions durables. Cela permettra non seulement de relever les défis actuels, mais aussi de saisir les opportunités offertes par la transition énergétique.

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